samedi 13 novembre 2010

Interview du yokozuna Hakuhô

Interview accordée à Sanspo par Hakuhô avant le tournoi qui le verra peut-être battre le record vieux de 71 ans du dai-yokozuna Futabayama.

Q : Vous êtes invaincu depuis le 14ème jour du Hatsu basho? Quel est votre état d'esprit actuellement ?
Hakuhô : Que ce soit dans le sumô ou dans la vie quotidienne, je deviens plus sensible sur différents points. J'ai l'impression que mon corps n'est plus uniquement le mien. Je dirais que c'est aussi le corps de tous mes fans. J'ai cette impression depuis la fin de l'Aki basho.

Q : Quand avez-vous pris conscience que vous pourriez battre le record ?
Hakuhô : Depuis le mois de mars. Jusqu'à ce que je devienne le seul yokozuna (après l'intai d'Asashôryû), je pensais que les responsabilités étaient les mêmes, qu'il y ait un ou deux yokozuna. Dès le premier jour (du Haru basho), j'ai senti que c'était complètement différent. Depuis, j'ai senti de plus en plus le poids des responsabilités et j'ai fait en sorte de les assumer. Les victoires se sont enchaînées avant que j'ai eu le temps de réaliser et il y a encore des choses qui m'échappent. Le Kyûshû basho va commencer et je vais peut-être les comprendre.

Q : Sans adversaire à votre mesure, les chiffres deviennent une motivation.
Hakuhô : Si vous vous préoccupez trop des chiffres, les résultats s'en ressentent. Faire de mon mieux chaque jour jusqu'au dernier, pouvoir m'améliorer, c'est cet état d'esprit qui permet d'obtenir les bons résultats.

Q : En juillet, vous avez résilié le contrat de votre entraîneur particulier. Comment entretenez-vous votre forme depuis ?
Hakuhô : Ca fait environ six mois mais je n'ai pas encore retrouvé quelqu'un. Mon épouse et mes tsukebito me massent, je m'arrange d'une façon ou d'une autre. D'ailleurs, actuellement je n'ai mal nulle part. Je vais bien au point que j'en suis moi-même effrayé.

Q : Quand avez-vous commencé à vous intéresser à Futabayama ?
Hakuhô : Il y a cinq ans. A l'époque où je suis devenu san'yaku je crois. Quelqu'un m'a dit 'Tu ressembles à Futabayama. Tu devrais t'intéresser à lui.'.

Q : Quelle impression avez-vous eu quand vous avez vu des photos et des images de lui pour la première fois ?
Hakuhô : Ce qui m'a le plus surpris c'est son visage. Ce n'est pas un visage de combattant. Pour parler simplement, je dirais gentil, qui ne montre pas sa puissance. C'est l'impression que m'a faite son visage.

Q : Quels sont vos point communs avec le yokozuna ?
Hakuhô : Le haut du corps pas très musclé et un sumô axé sur le bas du corps peut-être. Dans mon cas, mon père et mon oyakata (Kumagatani, ancien makuuchi Chikubayama) me disaient : 'La souplesse de ton coprs est un de tes points forts, ne le durcis pas.'. Je lui ressemble aussi parce qu'à l'entraînement je fais surtout des shiko, des suriashi, des teppô et pas d'haltères.

Q : Vous pensez que vous auriez pu enchaîner autant de victoires avec deux tournois par an comme à l'époque de Futabayama ?
Hakuhô : Les époques sont différentes, on ne peut pas comparer mais Futabayama est resté invaincu pendant quatre ans alors qu'il ne voyait plus de l'oeil gauche. Sur ce point, je ne peux pas rivaliser mais relever ce défi donne un sens à ce que je fais.

Q : Que ressentez-vous pour Futabayama maintenant que vous êtes en position de battre son record ?
Hakuhô : Il se trouve que le dôjô Futabayama se trouvait près de l'endroit où loge ma heya pendant le basho, c'est un signe. En battant ce record, je veux remercier ce yokozuna que j'admire beaucoup.

Q : Une fois dépassé le record de 69 victoires consécutives de Futabayama que vous respectez, quel est votre prochain rêve ?
Hakuhô : Ces 69 victoires sont un grand rêve mais j'en ai d'encore plus grands. Futabayama et Taihô sont deux yokozuna que j'admire. Taihô m'a appris beaucoup et pour le remercier, je voudrais battre ses 32 yûshô (Hakuhô en est à 16).

Q : Et sur le plan personnel ?
Hakuhô : Mon père a été yokozuna en lutte mongole. Si mon fils (Mahato/真羽人, 2 ans) devient yokozuna, nous formerons trois générations de yokozuna entre la Mongolie et le Japon. Dans la mesure du possible, j'aimerais en faire moi-même un yokozuna.

Q : Qu'attendez-vous du sumô actuel, qui semble être dans une impasse ?
Hakuhô : J'aimerais qu'un nouveau yokozuna qui partage mon état d'esprit voit rapidement le jour. Mais on doit devenir ôzeki pour pouvoir devenir yokozuna. D'abord, j'espère trois jeunes ôzeki. Pourquoi pas Tochiôzan. Mais je ne vais pas les laisser devenir yokozuna facilement. Comme je l'ai dit jusqu'à maintenant, je veux aussi être là pour faire barrage.

Q : La "Coupe Hakuhô", une compétition de sumô pour les enfants, va avoir lieu en décembre à Sakai, dans la préfecture d'Ôsaka (大阪府堺市). Pour quelles raisons ?
Hakuhô : Le sumô est le sport national japonais, je veux le développer. Je suis liée pour differentes raisons à Ôsaka. C'est là que j'ai foulé le sol japonais pour la première fois, que j'ai fait mes débuts (mars 2001), que j'ai obtenu ma promotion au grade d'ôzeki (mars 2006), que j'ai amorcé ma promotion au grade de yokozuna (mars 2007). Autant de raisons de le faire là-bas. Plus de 700 enfants vont participer mais je ne m'attendais pas à ce que ça prenne une telle ampleur. C'est grâce aux gens qui ont travaillé dans les coulisses. C'est aussi pour que cette compétition soit réussie que je dois faire un bon tournoi.

Sanspo